"Sous le soleil exactement"

La chaleur était écrasante. Difficile à supporter. Le goudron de la ville l'absorbait et Julia ne se sentait vraiment pas à l'aise sur le grand parking de l'hôpital. Elle sortait d'une nuit de veille et n'aspirait qu'à une fraîcheur réparatrice. Un vendeur ambulant à sa droite. Quelle chance, justement un vendeur de glace. Il était là pile au bon moment. La jeune fille s'inséra dans la file d'attente, suivant tous les enfants du parc d'à côté. Un fou rire la menaçait. Elle était la seule adulte au milieu d'une horde de petits. Un grand sourire aux lèvres elle fit sa commande au vendeur et, sa glace à la main, marcha jusque chez elle. Julia avait fait le choix de ne pas s'acheter de voiture, du moins pas pour l'instant. L'hôpital était tout près de chez elle et il y avait des épiceries à tous les coins de rues. Quand elle avait besoin d'aller un peu plus loin elle prenait le bus. Elle cherchait ses clés dans son sac, prenant soin de ne pas laisser tomber sa glace quand son portable se mit à sonner. Un message. Elle avait une sonnerie d'appel et une de message. Julia haussa les épaules, d'abord elle finissait sa glace et ouvrait sa porte, après elle lirait le message.

Citation :

Message d'Abigaïl
Salut Julia !! J'ai envie de fraîcheur et d'une amie par ce joli temps d'été ! Un petit tour au bord du lac ?! J'y serai vers 11h si tu es libre. Bisous.

Julia jeta un coup d'oeil à la pendule. Un calcul rapide s'effectua dans sa tête. Hmmm... Oui elle avait le temps de prendre une douche et d'être à l'heure au rendez vous avec Abigaïl. Elle fila à la salle de bain sous un jet frais après avoir rapidement répondu à la mère de Maya. Elle s'était occupée de cette petite tout le temps qu'elle avait été à l'hôpital. C'était une enfant génial, courageuse et très attachante.

Une heure plus tard, vêtue d'une petite robe légère, Julia arrivait au lac. Abigaïl n'était pas encore là. C'était rare que la douce maman lui donne rendez vous comme ça. En général, la jeune fille passait à l'improviste chez la petite famille. Elle adorait prendre des nouvelles de la mère comme de la fille. Elle s'était attachée à elle, vraiment. Julia s'assit dans l'herbe, à l'ombre d'un magnifique saule. Elle pourrait mettre les pieds dans l'eau si elle finissait par avoir trop chaud. Dans son sac, une paillasse et un peu de crème solaire si elle se décidait à s'allonger sous l'astre lumineux.

C'était un bonheur sans égal d'être là, à l'ombre d'un arbre si énorme. Julia commençait à se délasser un peu. Une petite brise vint agiter les branches souples du saule. Un léger frisson la parcourut alors. Elle avait passé le début de la journée à étouffer dans sa tenue de bloc et voilà que le vent se levait alors qu'elle avait enfin pu enfiler une tenue de saison. Mais la brise passa rapidement. La chaleur retomba, lourde et collante. Les jambes allongées dans l'herbe, la jeune fille remonta légèrement sa robe, de manière à avoir le minimum de tissu sur sa peau. Ses jambes étaient d'une blancheur extrême. Elles n'avaient pas vu le soleil depuis bien longtemps ... Les tenues hospitalières n'étaient pas vraiment idéales dans l'optique bronzage pendant les rares pauses dans la journée d'un futur médecin. Des pantalons amples et des hauts d'un bleu plutôt foncé. Autant dire qu'on ne sortait pas habillé ainsi en plein soleil, les couleurs sombres attirent trop la chaleur. La nuit avait été longue. Adossée contre le tronc du saule, les grillons chantant autour d'elle, Julia commençait à s'assoupir. Elle n'entendait plus que les bruits de la nature. Adieu éternels crissement de pneus et coups de klaxon du quotidien citadin. Si elle réussissais ses études de médecine et qu'elle devenait chirurgien c'était décidé, Julia s'achèterait une maison à la campagne, pour le plaisir de la nature et du relatif silence.

Les yeux fermés, la jeune fille avait à peine entendu son amie arriver près d'elle. Le petit salut d'Abi lui fit quand même ouvrir les yeux. Elle tourna un visage souriant, bien que souligné par les traits de fatigue de sa nuit presque blanche, vers Abigaïl. Le sac tombé, la jeune maman s'installa près d'elle. Julia lui fit la bise, et remit au passage sa robe en place. Elle avait toujours été relativement pudique ... Un comble pour elle qui voyait sans arrêt les gens nus sur les tables d'opération. Un vague signe de la main pour signifier une longue nuit.

Ho moi tu sais ça va toujours ... Mise à part la fatigue ! J'ai encore du travailler toute la nuit. Parfois j'ai vraiment l'impression de me faire avoir par mes supérieurs !!

Elle sourit à pleines dents. En vérité, même si les nuits étaient un peu longues à l'hôpital, Julia adorait y être. Sa première motivation dans ses études et son projet d'avenir, c'était sans aucun doute les patients. Elle aimait les accompagner et leur redonner un peu le sourire dans les moments difficile. Sa mère lui avait appris qu'il valait mieux rire des choses, si dures soient-elles, qu'en pleurer. Alors la jeune fille sortait sa petite bille de clown en pédiatrie pour entendre le rire des enfants et écoutaient des heures durant les plaintes et les histoires des patients des services dans lesquels elle passait. Elle était réputée pour être douée d'un certain sens du contact au sein de l'hôpital. C'était là qu'elle avait d'ailleurs rencontré Abigaïl. Une triste histoire d'amitié formée sur le sourire d'une petite fille, celle d'Abi.

Et toi ... Ho mon dieu mais comment fais tu pour porter des manches, si courtes soient-elles, par ce temps ?!! Il fait une chaleur atroce ... La moindre parcelle de tissu me fait mourir de chaud et me colle à la peau !

Quand elle commençait à parler, Julia ne reprenait pas sa respiration entre les phrases. Une partie de ce qui amusait les gens à son sujet ! Elle ne laissait pas toujours le temps à son interlocuteurs de répondre. C'est pourquoi dès qu'elle eu prononcée sa dernière phrase elle stoppa le flot de paroles nettes. Elle se rendait bien compte qu'Abigaïl ne proposait jamais de rendez vous sans en avoir parlé avant... Il devait y avoir une raison à leur présence ici. Le cerveau de Julia réfléchissait à mille à l'heure.